mercredi 24 janvier 2007

Message de Denise Couture d'Amsterdam

(Voici le message que Denise Couture, retournée plus tôt à Montréal, a envoyé à notre délégation il y a deux jours.)

Je vous écris de l'aéroport d'Amsterdam, alors que je suis sur le chemin du retour vers la maison. Je me sens triste et déçue d'avoir quitté le groupe la première et avant la fin du forum social. Hier, dans un atelier organisé par le groupe mondial « Des femmes pour la paix », une femme blanche a demandé à l’une des coorganisatrices du forum social, une femme noire : « Que dois-je rapporter chez moi de mon expérience à Nairobi ? » Celle-ci a répondu : « La relation que tu as établi avec moi. » La femme kenyane nous recevait chez elle. Elle nous a proposé de mettre en pratique une nouvelle manière de penser : de ne pas considérer le continent africain comme perdu, oublié et incapable de contribuer au mouvement altermondialiste mondial, mais plutôt de nous rappeler qu'un grand nombre de personnes africaines sont engagées dans des luttes de libération et que nous avons le défi de construire une solidarité internationale entre les personnes qui travaillent pour la libération. Cette femme nous a demandé de modifier une structure de pensée qui fait en sorte que l'on aborde très spontanément les Africaines comme des victimes. Cette façon de faire consolide les relations coloniales et fait obstacle à la tâche commune de bâtir les conditions d'une solidarité. La question n'est pas de savoir ce que le forum mondial peut faire pour les femmes, a-t-elle dit, au contraire l'action du groupe « Les femmes pour la paix » offre plutôt au forum social une proposition d'alternative. Cette femme a raison. Ce que je rapporte de mon expérience à Nairobi, ce sont de nouvelles amitiés, des relations personnelles établies avec des personnes hors de l'ordinaire. Ces relations sont politiques. Nous avons fait ensemble une analyse des structures qui rendent possibles des injustices vécues par des femmes et des hommes. Je pars avec la recommandation de Teresa Okure (doyenne d'une Faculté de théologie au Nigeria) d'apprendre à penser autrement : de ne pas considérer les femmes du bidonville de Kibera comme des victimes, mais de poser la question : comment Kibera est-il devenu possible? Comment agir pour qu'il devienne une impossibilité?

Buenas tardes
See you
Meilleures salutations

Denise